Michael Moore au pilori

Publié le par Mangelune

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J'ai enfin pu voir Polémique système, le documentaire-vérité sur le célèbre trublion américain, j'ai nommé Michael Moore, l'homme sur lequel tout le monde a un avis bien tranché ("s'il y en avait plus des comme lui" / "je déteste ce type").

En deux mots, ce documentaire commence lorsque deux auteurs canadiens décident d'en savoir plus sur un homme qu'ils jugent sincère, brillant voire indispensable. Voulant en dresser un portrait fidèle, ils vont aller de déceptions en consternations et comprendre que Michael Moore n'est pas un modèle de vertu contrairement à ce que disent ses discours de meetings en cinéma.

Etait-il nécessaire d'attaquer cette icone de la gauche américaine ? Oui et non. Oui parce qu'il existe des personnes suffisamment naïves pour croire tout ce qu'on leur raconte, y compris à gauche, et parce que la popularité du sujet allant grandissant il est bon d'en nuancer la sainteté. Non, compte tenu de la faiblesse de la gauche, du rejet global de la politique et de l'importance cruciale du débat quand aux thèmes abordés par lui. Critiquer Michael Moore c'est donc aussi donner du grain à ceux qui n'en ont pas besoin. Le problème est également situé dans la faiblesse des éléments fournis, ou tout du moins du décalage entre leur ampleur et le ton du documentaire (on apprendrait que cet homme vend des armes aux enfants que ce serait pareil !).

On y apprend que Michael Moore déforme la vérité pour servir son propos, qu'il sort des éléments de son contexte, qu'il fait des juxtapositions hasardeuses, qu'il ment même sur des faits qu'il invente de toutes pièces. Le problème est qu'on sent cela dès qu'on voit un de ses films. On lui reproche également de se mettre trop en avant. J'y vois personnellement une forme de garde-fou ; en effet quand je vois un auteur qui se filme lui même, utilise l'humour, le dessin animé, le montage, je sais qu'il va me mentir, mon esprit critique est prêt ; là où un documentaire plus sobre, plus sérieux aurait d'avantage de facilités à me berner. Pour autant, cette distance critique ne m'empêche pas d'apprécier le ton de ses films, mais aussi de trouver qu'aux USA les armes devraient être contrôlées, la sécurité sociale gratuite, les licenciements limités...

On dit également dans ce documentaire que si la fin justifie les moyens pour Moore, alors autant dire que la CIA a raison de torturer au nom de la paix. Bush et Moore même combat ? Dur de comparer la propagande audiovisuelle gauchiste à la torture. Beaucoup d'arguments semblent disproportionnés, déformés. Comme cet homme qui a interviewé le polémiste, lui a posé des questions acerbes et a reçu dès lors des réponses sèches, et qui en a tiré la conclusion que sa victime était schizophrène et aggressives !

Tout est mélangé dans ce documentaire, on y parle tantôt du propos, des méthodes, des mensonges, mais aussi du caractère caché du personnage qui se révèle - oh mon dieu - humain et donc complexe (oui il n'est pas aussi gentil, altruiste, désintéressé qu'on le croit). Le tout avec une musique inquiétante quand nécessaire, et en utilisant la même méthode que Moore à savoir tenacité, culot, et montage manipulateur. Ou comment dénoncer quelque chose en faisant pareil, c'est beau comme un 99F tiens.

Tout n'est pas à jeter là-dedans, beaucoup de faits sont intéressants mais cela aurait pu être traité avec beaucoup plus de finesse et d'argumentation.

Publié dans Cinéma

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